Archive pour la catégorie ‘plumes à rêver’

Aube…

dimanche 30 août 2020

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« … « Et si nous tournions le dos aux vents qui viennent de la ville ? Ils ne sont pas seulement alourdis par la poussière du désert, mais asséchés par la soif de l’or. Le pouvoir nous méprise, il ne s’intéresse pas à nos âmes, il vit trop loin de nous. Et de toute façon, il nous transforme en esclaves, regardez d’ailleurs le tigre : il ne s’attaque qu’aux hommes courbés. Donc fuyons-le, rendons-nous maîtres de notre bref passage en ce monde. Recommençons, comme avant, à nous mettre à l’écoute du ciel, des animaux, des nuages, des arbres, des insectes, des serpents, des fleurs, des plantes. Et puisque la vie et l’eau sont les seules vérités qui tiennent, occupons-nous de la vie et de l’eau. »

Ce furent des mots très clairs en somme. Très simples, à la portée de tout un chacun, des phrases limpides et fluides, la vérité lui coulait de la bouche sans le moindre arrangement ni ornement. « Si vous voulez de l’eau, dit Djambo ce soir-là pour la première fois, commencez par la chercher au fond de vous, soyez à vous même une source. Et ensuite, rappelez-vous que la nature est un corps, un corps immense, dont nous ne sommes, nous, les humains, qu’une infime partie. Mais si petits soyons-nous, nous nous en sommes pris à ce corps et l’avons gravement blessé. Donc à nous de le guérir. Non par une religion de plus, mais par une nouvelle façon de vivre, une humble façon. Car nous ne changerons le monde en grand que si nous commençons, misérables corpuscules que nous sommes, par le changer en tout petit. Et soyons patients, car le seul lieu des hommes, ce n’est ni leur champs ni leur village, ni leur ville, ni même leur pays. C’est le Temps. »…

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… Les guerres éclatent quand on commence à appeler vraies des choses qui sont fausses. Et fausses des choses qui sont vraies…

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… Vous ne trouverez pas ici de dieu de la peur ou des menaces. Et encore moins des pensées qui se tordent sur elles-mêmes et se perdent en complications. Le Suprême est partout dans la Nature, comme je vous l’ai dit, et par conséquent il est en nous, les hommes. Nous les Vingt-Neuf, quand nous nous levons, chaque matin avant l’aube, nous n’avons qu’une seule interrogation : savoir par quels actes nous illustrerons cette parcelle de divin qui nous a été remise avec la vie. Nous estimons l’homme à ce qu’il fait, non à ce qu’il raconte. Et pour le juger, nous ne nous posons que deux questions. La première : a-t-il dit et respecté la vérité ? La seconde : le feu de la violence, en lui, a-t-il réussi à l’éteindre ?… »

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L’histoire relatée est celle de Djambo « la merveille », rejeté par sa famille et son village, au XVème siècle, en Inde , à la limite du désert du Thar.

Ce jeune garçon suit les pas d’un magicien puis d’une danseuse de rue. Les puissants se font construire d’incroyables palais, coupent les forêts, assèchent le désert, asservissent les pauvres… Djambo, lui, après errance et souffrance,  veut croire en un autre monde,  une poignée d’hommes et de femmes l’accompagne, au fil du temps d’autres les rejoignent ; ils existent toujours 5 siècles plus tard, ce sont les Bishnoïs. Ils ont établi 29 règles qui prônent le respect de l’Homme et de la Nature, et nous questionnement quant à notre rôle sur terre.

Ce livre parle de l’orgueil qui mène à la barbarie, de l’humanité, de la vraie écologie, pas de l’écologie politique, c’est une lecture qui nous emporte, inspirée et inspirante. Rien n’est jamais acquis dans notre existence, tout est fragile et tout doit être respecté sinon le monde bascule. L’auteure a fait une belle recherche et nous livre ici un texte sensible.

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Claudie en avait très bien parlé —> ICI

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Extraits de : « La Forêt des 29 »  2011  Irène Frain.

Illustrations : 1/« Tête de tigre »  Raden Saleh  1811-1880   2/« Séléné » illustration du poème de John Keats « Endymion »  William James Neatby  1860-1910.

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Fuir les bavardages en tous genres, créer l’aube d’un nouveau jour…

BVJ – Plumes d’Anges

Émotions profondes…

mardi 18 août 2020

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« … Les sapins sont les arbres préférés des nuages.

Ils poussent spontanément vers eux leurs cimes. Les nuages viennent, ils tournent, ils s’approchent, ils s’accrochent. Soudain ils pèsent. Ce sont des compagnons sûrs et certainement de merveilleux amants. Les pics, les troncs, les fûts, l’écorce qui les cerne, se haussent davantage pour saisir leur étoffe mystérieuse et pour la retenir. Alors les nuages les enveloppent d’humidité de façon passionnée, en tout cas si fréquente, si récurrente.

Ils reviennent, ils s’alourdissent encore. Ils coulent. Ils sont fidèles.

Ils haïssent la lumière.

Ils aiment la neige que le ciel crée mystérieusement…

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Plus la montagne s’élève, plus elle entre en contact avec le froid du ciel. Plus le gel en disloque la masse, plus elle épointe les roches que la glace fragmente encore. Les débris roulent sur les pentes ; les pluies les perforent ; les torrents balafrent les volumes les plus imposants avant de les amenuiser. La neige glissant des crêtes s’accumule dans les fonds et forme des glaciers qui eux-mêmes poussent et pressent les parois des cavités qui les contiennent. Peu à peu les glaciers les aménagent en cirques d’où s’écoulent des fleuves. Les fleuves enfin creusent lentement les énormes sillons des vallées en contrebas des flancs.

C’est ainsi que les montagnes sont exhaussées et que la nature se sculpte.

C’est ainsi que plus le volume est saillant, plus la hauteur aiguë, plus l’érosion puissante, plus le flanc déchiqueté, plus le ruissellement se fait torrentueux et blanc.

Le fragment dans ce monde est l’éclair…

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L’apparence de « sphère » que le ciel se donne, à l’instant où surgissent les étoiles, n’est elle-même qu’une fiction, qu’invente le regard qui se lève vers les spasmes de lumière qui tournent…

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Dans la neige actuelle qui tombe dans l’aube (une fois qu’on en voit la masse continue qui brille, qui scintille, qui émerveille en ouvrant la fenêtre au sortir du sommeil), la neige d’antan tombe avec elle.

La neige actuelle apporte avec son éblouissante blancheur son étrange et lointain silence de jadis.

On ouvre la fenêtre et on s’enfonce dans le Temps à jamais… »

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Ce récit est un long poème, il nous emmène

– et parfois nous égare – dans de lointaines brumes,

au temps de la création de la langue française.

C’est un retour aux origines,

une mise au monde dans la douleur et la lumière.

On y parle de deux frères jumeaux, Nithard et Hartnid,

petits fils de Charlemagne, que tout oppose.

L’auteur joue avec l’Histoire et avec les mots,

les images sont magnifiques, c’est doux, sombre et puissant à la fois,

c’est  un chant, une prière dont cet auteur est vraiment le virtuose.

On se laisse emporter par cette écriture éclatante et tellement poétique…

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Extraits de : « Les Larmes«   2016  Pascal Quignard.

Illustrations : 1/« Brouillard du matin dans les montagnes »  Caspar David Friedrich  1774-1840   2/« Mont Krivan »  Peter Michal Bohun  1822-1879.

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Se laisser submerger… par la poésie…

BVJ – Plumes d’Anges.

Profonde blessure…

lundi 20 juillet 2020

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…  » Pauvre petit grand-père inconnu qui ne pouvait se douter à ce moment-là que, la guerre finie, une fois ses bourreaux exécutés, sitôt dévidée cette pelote de faits et de gestes qui passe par la Bretagne, le nord de la France et l’Allemagne, les trains de la peur, les cargaisons de prisonniers effondrés, l’usine à fusées, la boue glacée, le fils ainé de son fils cadet le pisterait soixante dix ans plus tard… Lui, pris au piège de la lumière glauque du baraquement avec sa tête de bagnard. Sa pâleur aussi. Sa maigreur. Ce qui le ronge, ce qui le terrasse. Lui, l’Indochinois, le Brestois, l’époux de Jeanne, le père de Lucie, Ronan et Pierre. Lui, l’enfant des presqu’îles. Lui, dans sa minuscule et si fragile éternité, arc-bouté puis broyé…

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… Une lettre toute simple, blanche et rectangulaire, était arrivée ce matin-là, sans crier gare, dans ma boîte. Après la parution de l’un de mes précédents livres, j’avais donné une interview au magazine Bretons, évoquant l’histoire de ma famille brestoise, et l’un des lecteurs m’écrivait. Ses premiers mots me firent l’effet d’un coup de tonnerre. Je dus m’asseoir. L’auteur du courrier avait quatre-vingt-deux ans, Yves J…, il vivait en Bretagne, il avait hérité d’une maison de famille à Plomodiern et, durant la guerre, sa mère avait été la secrétaire de Paol aux Chantiers de Bretagne au moment où l’entreprise de BTP avait été, comme beaucoup d’autres, utilisée ou réquisitionnée par l’Organisation Todt… ».

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Nous avons tous besoin de savoir qui nous sommes, bien sûr,

mais aussi d’où nous venons.

Et quand des secrets, des non-dits familiaux laissent nos questions sans réponses,

vient un jour où l’on se met en quête d’une vérité…

C’est ce qu’a fait l’auteur, la blessure familiale au sujet de Paol, le grand-père,

était si présente qu’il ne pouvait plus vivre libre

et avancer dans son existence.

Il y a des bagages dans la vie que nous pouvons porter très longtemps,

d’une génération à l’autre,

mais arrive un moment où l’on comprend que ce n’est plus possible,

qu’il faut trouver une solution,

tenter de comprendre et soigner l’arbre… généalogique.

C’est là une très belle lecture, une démarche nécessaire faite dans une grande solitude,

parce qu’elle n’est pas accessible à tous, n’ayant pas les mêmes forces,

les mêmes ressources.

Le contexte est terrible, celui de la période nazie, des camps,

c’est une quête, une enquête, avec des éléments vrais glanés pendant de longues années,

et d’autres imaginés par un écrivain de grand talent…

Aifelle en avait parlé —>

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Extraits de : « La part du fils«  2019  Jean-Luc Coatalem.

Illustrations : 1/« Bretonnes au bord de la mer »  2/« Soleil couchant sur la côte bretonne »   Ferdinand du Puigaudeau  1864-1930.

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Faire lumière sur le passé pour envisager le présent et construire l’avenir…

BVJ – Plumes d’Anges.

Réminiscences…

samedi 6 juin 2020

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« … Nous étions les enfants d’un monde latin, méditerranéen. D’avoir grandi au bord de la méditerranée, dans la familiarité des oliviers et des pins parasols, des palmiers et des géraniums en pots, nous donnait cette vague supériorité sur les habitants du reste de la France. Comment pouvait-on lire Virgile à Paris, dans la grisaille et les fumerolles des poêles à charbon ?

Pourtant chaque été, à Sainte-Marine, en Bretagne, nos convictions étaient bousculées. Par le vent, le crachin, les marées, les tempêtes, ou tout simplement par les champs de pommiers et la lande.

La lande, nous avions appris à la reconnaître. Par la langue bretonne d’abord : en Bretagne, lann cela ne veut pas dire n’importe quoi. Cela veut dire les étendues d’ajoncs, cette fourrure gris-vert qui recouvre la terre, qui s’empare de tous les lieux inhabités. Est-ce que nous savions qu’elle était cultivée ? Je ne me souviens pas d’avoir vu des tombereaux de cette plante qui servait de nourriture aux chevaux de trait et au bétail, ni d’avoir entrevu dans la cour des fermes l’appareil à main qui permettait de la déchiqueter. Cela avait probablement déjà disparu dans l’après-guerre. (…) Al lann, c’était la plante indispensable à cette économie. À la fin de l’été, elle produisait un spectacle de fleurs jaunes, au moment où les genêts ouvraient leurs pétales d’or, et la bruyère ses lacs roses et rouges…

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… En Bretagne, la violence de la mer, du vent, de la pluie, et aussi la brûlure du soleil certains jours. La solitude des criques, encombrées de galets géants, trouées de grottes où les vagues explosent. Et la lande où parfois surgit une pierre levée, un menhir, dont le vrai nom en breton est peulven, le pilier de pierre…

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… Je me souviens d’avoir collé mon oreille contre le granite des dolmens pour entendre la vibration électrique qu’ils émettaient, et je l’ai entendue ! Ce qui me paraissait extraordinaire, incroyable, ce n’étaient pas ces constructions archaïques, c’était que les Bretons étaient arrivés un jour dans ce pays et qu’ils avaient été reçus par ces dieux, qu’ils les avaient respectés, parfois craints, et que les dieux les avaient laissés s’installer chez eux. Sans doute parce que je venais d’ailleurs, que je n’étais jamais chez moi nulle part, balloté, baladé entre la Maurice de mon père, la Bretagne de mes ancêtres et la Nice de mon enfance – il y avait donc cette étrangeté au monde, cette déroute, cet exil et les piliers de pierre dressés vers le ciel, les allées couvertes pareilles à des écailles de dragon, les vaisseaux couchés dans les ajoncs me disaient qu’il y avait un autre monde monde avant le mien, que j’étais juste de passage… »

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À l’instant même où il « fête » son 80ème anniversaire, J.M.G. Le Clézio nous offre deux magnifiques textes sur l’enfance et ses réminiscences, entre pays de Bretagne et pays de Provence. Il n’y a pas d’ordre chronologique, ce sont des images exhumées de sa mémoire ou de ses émotions. Le premier conte parle de vacances en Bretagne, il dépeint la puissance des paysages, leurs couleurs, leurs parfums, il dit la langue, les caractères, les relations, les moments heureux…

Après nous avoir ouvert le cœur, l’auteur explore dans un deuxième conte, ses cinq premières années de vie, pendant la guerre. Sa mère, son frère, ses grands parents, mènent une existence recluse dans un tout petit village de l’arrière pays niçois. Tout est « doucement » douloureux et ce dont il a le plus souffert, nous dit-il, c’est de la faim, la faim qui a laissé un vide au fond de lui et l’a marqué profondément. Il y a les silences, les non-dit, les gens admirables, pendant toute sa vie, il a cherché à comprendre les traces que laisse la violence de la guerre.

Une très très belle lecture, une fois encore…

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« … Être né dans une guerre, c’est être témoin malgré soi, un témoin inconscient, à la fois proche et lointain, non pas indifférent mais différent, comme pourrait l’être un oiseau, ou un arbre. On était là, on a vécu cela, mais ça n’a pris de sens que par ce qu’on a appris par les autres, plus tard (trop tard ?)… ».

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Extraits de : « Chanson bretonne suivi de L’enfant et la guerre »  2020  J.M.G. LE CLÉZIO.

Illustrations : 1/« Le soir aux grèves de Roscoff »  Jean-Edouard Dargent  1824-1899  2/« Pâtre au crépuscule en Provence »  Emile-René Ménard  1862-1930.

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S’abreuver aux sources les plus douces…

BVJ – Plumes d’Anges.

Pom pom pom pom…

lundi 20 avril 2020

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Vous qui passez par là, venez donc lire ces quelques lignes :

– LE PARTAGE DE LA TERRE –

« Prenez le monde, dit un jour du haut de son trône, Jupiter aux hommes, prenez-le, il est à vous, je vous le donne pour en jouir à tout jamais, sachez seulement en faire un partage fraternel. »

Alors on vit accourir tous ceux qui pouvait en prendre une part, jeunes et vieux arrivèrent à la hâte : le laboureur s’empara du produit des champs, le gentilhomme de la forêt, le marchand remplit ses chariots, l’abbé choisit le vin chaleureux, le roi mit une barrière sur les ponts et les chemins et s’écria : »La dîme est à moi ! ».

Longtemps après que le partage était terminé, arriva le poète. Il venait de loin, hélas ! et il ne restait plus rien, chaque chose avait son maître.

– « Malheur à moi ! faut-il que je sois ainsi seul entre tous oubliés, moi, ton fils le plus fidèle ? » Il exhalait ainsi sa plainte et se jeta devant le trône de Jupiter.

– « Ne m’accuse pas, répondit le Dieu, si tu t’égares dans l’empire des rêves. Où étais-tu lorsqu’on a partagé le monde ? »

– « J’étais, reprit le poète, près de toi. Mes regards contemplaient ta splendeur, mon oreille écoutait l’harmonie céleste. Pardonne à l’esprit qui, dans le charme de ta lumière, oublie les biens terrestres. »

– « Que faire, s’écria Jupiter, le monde est donné, les fruits, la chasse, les marchés ne m’appartiennent plus. Veux-tu venir dans mon ciel auprès de moi ? Chaque fois que tu voudras y monter, il te sera ouvert. »

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– DÉSIR –

« Ah ! Si je pouvais trouver une issue à cette vallée profonde, sur laquelle pèse un froid nuage, oh,  que je serais heureux ! Là-bas j’apercevrais les belles collines toujours riantes et toujours vertes. Que n’ai-je des ailes pour m’élancer vers ces collines !

J’entends résonner les douces harmonies du ciel, et des vents légers m’apportent des parfums balsamiques. Je vois briller des fruits d’or sous un épais feuillage, et les fleurs qui s’épanouissent là ne seront la proie d’aucun hiver.

Oh ! qu’il doit être doux de vivre à cet éternel rayon de soleil, que l’air de ces collines doit être rafraichissant ! Mais un torrent fougueux me sépare de cette contrée, et la fureur des vagues épouvante mon âme.

Je vois une nacelle se balancer sur l’onde, mais, hélas, je ne vois point de batelier. Allons, courage, n’hésitons pas, les voiles sont enflées, il faut croire, il faut oser, sans attendre l’assurance des Dieux. Le miracle seul peut te porter dans la terre du miracle. »

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et venez donc aussi admirer et écouter :

LA SYMPHONIE DU DESTIN

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Textes et musique (merci R.T.) trouvés sur le net,

ces voyages virtuels nous font faire d’agréables découvertes, souvent très à propos,

les talents sont immenses et l’imagination galopante, ne trouvez-vous pas ?

Bien-sûr, une fois encore, il nous faut faire preuve de vigilance,

vérifier, croiser, encore et toujours, et ne pas tout gober comme de petites mouches.

Courage aminautes de France, de Navarre et d’ailleurs,

nous nous tenons la main silencieusement et

la musique du monde continue à jouer sa partition…

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Poèmes de Friedrich Schiller  1759-1805.

Film de Edvard Grieg – Symphonie numéro 5

écrite par Ludwig van Beethoven entre 1804 et 1808

et jouée pour la première fois au Théâtre de Vienne le 22 décembre 1808.

Illustrations : 1/« Papillons et autres insectes » Jan van Kessel l’ancien  1626-1679   2/« L’eau silencieuse »  Sydney Laurence   1865-1940.

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Voyager joyeusement sur les ondes…

BVJ – Plumes d’anges

Transmutation…

vendredi 17 avril 2020

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« Ce que la chenille appelle la fin du monde,

le Maître l’appelle un papillon »

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« Il n’est jamais problème qui n’ait un cadeau pour toi entre ses mains.

Tu cherches des problèmes parce que tu as besoin de cadeaux »

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Un petit livre lu il y a longtemps et relu ces jours derniers,

un petit livre tout simple, léger comme une bulle, un peu magique,

un éclat de lumière dans la vie.

Changer notre regard sur le monde me semble important,

c’est une volonté, cela ne se fait pas tout seul,

nous devons chercher, faire appel à notre imagination,

la laisser déborder,

elle nous étonnera certainement…

  Qu’en pensez-vous ?

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Citations extraites de : « Illusions – Le Messie récalcitrant »  1977  Richard Bach.

Illustrations : 1/ « Chenille lunaire »  Abott Handerson Thayer  1849-1921    2/ « Papillon de l’Atlas »  Miniature anonyme du XVIIIème.

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Changer notre regard sur le monde…

BVJ – Plumes d’Anges.

Résurrection…

jeudi 9 avril 2020

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« Un poème a perdu l’image qui le fit naître.

La petite illumination qui accompagnait l’image

et qui l’avait peut-être créée,

resta là désabritée comme un vol sans oiseau.

 

La petite illumination

oublia alors le poème

et entra dans les yeux du poète

afin qu’ils voient au moins

le poème non écrit.

 

Et aussi pour attendre en eux

et s’ajouter à tout poème futur. »

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« De façon inespérée

survient quelquefois une musique

qui palpe notre parole la plus cachée.

 

Il peut arriver alors

que cette musique la mette en lumière

ou reste avec elle

dans le candélabre le plus secret.

 

Dans tous les cas

notre solitude a rencontré

une présence indéfectible. »

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Sortons des brumes, sortons des clichés…

Petite illumination, petite musique…

Et si nous transformions nos plus belles fleurs sauvages,

celles que nous n’avons jamais osé laisser vivre en nous ?

Peut-être trouverions-nous là un remède à la bonne santé du monde…

Poèmes :« Quatorzième poésie verticale »  Roberto Juarroz  1925-1995.

Illustration : « Lys de Pâques »  Théodor Grust  1859-1919.

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Cueillir les fleurs de lumière pour transformer notre chemin…

BVJ – Plumes d’Anges.

Solitudes…

lundi 23 mars 2020

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« … Entre deux cartes postales, elle leva les yeux pour regarder le parc et ses frondaisons prodigieuses. (…)

La vieille dame se rapprochait d’elle mais elle n’avait pas envie de parler. Pas seulement à cette vieille dame, mais à qui que ce soit. Elle avait pris de bonnes décisions à propos de la façon de mener sa nouvelle vie : elle devait se concentrer sur elle-même. C’en était fini de s’occuper des autres et avait commencé l’apprentissage de l’égoïsme. Non mais. Elle avait fait sa part. Elle reprit l’écriture de ses cartes, en allant plus lentement afin qu’au moment ou la vieille dame allait croiser la table et le banc, elle ait l’air le plus occupé possible. C’est ce qui se passa. Et elle en eut honte, immédiatement dès qu’elle eut dans son champs de vision le dos de la vieille dame claudicante. Mais pourquoi penser obligatoirement que cette vieille dame allait parler, s’asseoir, l’empêcher d’écrire ses cartes postales ou son courrier, lui demander quelque chose… Non, non, non ! On ne pouvait pas lui demander de changer à ce point, de se replier sur elle-même, de… Mais on ne lui demandait pas ça non plus… Oh, la la ! Elle ne se reconnait plus, c’est vrai… Elle aurait pu sourire à cette dame, simplement sourire…

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… Et si elle écrivait sur tous ces vieux, comme la vieille dame de la grande maison, qu’elle avait déjà rencontrés ? Elle pourrait leur donner la parole et ils témoigneraient ce que c’est que la vie quand on n’a plus de chez soi, plus d’autonomie, plus de famille, plus de santé et qu’on ne dit plus jamais plus tard… Elle ne ramènerait en arrière aucun de ceux-là, elle ne leur rendrait ni leur jeunesse, ni leur maison, ni leur mari ou leur épouse, ni leur mère ou leur père, ni leur santé, rien de rien, non, elle ne leur rendrait rien. Mais elle pourrait peut-être sortir de l’oubli des vies qui s’y enfoncent inexorablement et, le temps de quelques rencontres, briser le silence d’une journée, être une éclaircie…

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… Tout allait bien. Il faisait beau. Il faisait bon aussi pour un mois de novembre. Tout était splendide autour d’elle. Elle marchait. Elle faisait un pas puis un autre pas. Tout allait bien. Il y avait le vide, oui. Le grand vide de l’absence. Le trou béant. Sans fond. Pourtant, elle était là, à marcher sur la corniche de Tamaris un matin de novembre. Elle était vivante. Elle était encore vivante. Une miraculée avait dit le docteur. La championne des miraculées avait dit l’autre docteur… »

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Le sujet est courageux dans notre société, celui des personnes âgées et des aidants de fin de vie. La dame aux cartes postales, Marie, a donné entièrement dix ans de son existence à l’accompagnement de ses parents, jusqu’à leur dernier souffle. Une épreuve qui la marque, elle va tomber gravement malade mais courageusement va lutter, se reconstruire.

Après une lourde opération Marie va se reposer dans un joli lieu au bord d’un lac. Elle rencontre là une vieille dame qui vit dans une grande solitude.  Plus tard, Marie tentera de faire de ses épreuves une force, une ouverture à l’autre, elle décidera de donner la parole à des personnes très âgées et à leur entourage.

C’est émouvant, des mains se tendent, de petites étoiles brillent, une nouvelle vie s’amorce, pour elle comme pour celles et ceux qu’elle rencontre. La belle humanité est là dans toute sa simplicité.

C’est vraiment un sujet interpellant quand on avance en age et ce livre peut nous aider dans l’accompagnement de nos proches, il nous montre que dans toute situation, une lumière brille.

Et puis l’on sent que Marie, ayant déposé son lot d’épreuves au travers des mots, peut envisager une vie nouvelle. La note finale du roman est très belle.

En ces temps de confinement, nos pensées vont particulièrement vers ces personnes âgées- très isolées –  et les aidants…

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Tania en avait parlé –> 

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Extraits de : « Avec la vieille dame »  2020  Marie Gillet.

Illustrations : 1/ »BellagioLago di Como »   Cartolina postale  2/ « Dame et chat »  Nikolaï Iarochenko  1846-1898  3/ « Fiori » – Cartolina postale 1905.

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Aider mais se ressourcer aussi…

BVJ – Plumes d’Anges.

Écoles buissonnières…

jeudi 19 mars 2020

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« … Beccafumi à Sarteano

Vous connaissez à la rigueur le peintre Domenico Beccafumi, mais sûrement pas le village de Sarteano, 5000 habitants, au sud de la Toscane et aux confins avec l’Ombrie, non loin de Panicale, dans la région de Montepulciano et de Pienza, ces joyaux de l’urbanisme Renaissance enchâssés dans un paysage de colline dont les pentes doucement inclinées sont enveloppées dans une brume que Paul Bourget a qualifiée de « violette »…

… Le corso Garibaldi se termine par la place où s’élève la modeste église S.Martino, reconstruite en style néoclassique sur l’emplacement d’un ancien édifice démoli, dont il ne subsiste que la cloche. Qui s’attendrait à y trouver, sur le mur de droite, un chef d’œuvre de la peinture du XVIème siècle ?

Le paysan Giacomo di Pace travaillait comme laboureur sur les terres du nommé Lorenzo Beccafumi, citoyen siennois, quand lui naquit, en 1486, un fils qu’il baptisa Domenico et envoya tout jeune garder les moutons. Tel Giotto, l’enfant s’amusait à dessiner sur des pierres ou dans le sable à l’aide d’un bâton appointé. Ayant remarqué les dons précoces du garçon, Lorenzo Beccafumi l’emmena à Sienne et le plaça dans l’atelier d’un peintre...

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Pierro della Francesca à Monterchi

Cette fresque si célèbre n’aurait aucun titre à être rappelée dans ce livre, si elle n’était conservée dans un village difficile d’accès, qu’on n’atteint qu’au bout de routes escarpées et sinueuses, au milieu de montagnes inhabitées. Piero l’avait peinte, vers 1450, pour servir de retable au maître-autel de la petite église Santa Maria della Momentana, située sur les pentes de la Citerna, au-dessous de l’éperon sur lequel est bâti le village fortifié de Monterchi, à quelques 25 kilomètres à l’est d’Arezzo…

… Les deux anges aux cheveux courts fixent le spectateur de leurs yeux grands ouverts, dont le regard intense est pourtant vide…

… Quant à la Madone, sereine et majestueuse, mais à la fois pensive et modeste, elle abaisse ses pupilles, vides et absentes, sous des paupières lourdes tracées d’une ligne sinueuse…

… Sur son beau front poli, avec sa bouche petite et resserrée, sa main droite posée sur son ventre pour indiquer le mystère de l’Incarnation dans son corps est le lieu, avec son port de reine, la Madone est ici et en même temps ailleurs, devant vous et très loin de vous dans un lointain inscrutable…

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En ce moment délicat du confinement, il nous faut trouver de possibles belles échappées. Nous avons une chance incroyable, celle de pouvoir voyager dans notre tête, imaginer, imaginer encore, des lieux, des situations, nous laisser envahir avec bonheur et délectation.

Plus de concerts, de théâtres et de cinémas ouverts ? Il nous reste encore les livres dont les sujets nous portent vers d’autre mondes.

Là, une balade du sud au nord de l’Italie, la balade d’un érudit qui a déniché des pépites artistiques souvent méconnues et pourtant réalisées par des peintres ou des sculpteurs célèbres. Son propos est passionnant, il resitue les œuvres dans leur contexte, raconte l’Histoire, raconte des histoires. On sent le passionné d’Italie, le discours est joyeux, jamais ennuyeux, bien au contraire, on se surprend à prendre des notes pour un voyage prochain – quand ? plus tard !

Les illustrations sont en noir et blanc, de petite taille. J’ai trouvé intéressant lors de cette lecture de faire apparaitre ces œuvres ou ces lieux sur mon écran d’ordinateur.

Ah, vous voyez, nous ne sommes pas si confinés que cela,

nous avons tous de petites réserves si nous cherchons bien, non ?…

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Extraits de : « L’Italie buissonnière » 2020  Dominique Fernandez.

Illustrations : 1/« L’Annonciation »  Domenico Beccafumi  1446-1551   2/« Madonna del Parto »   Piero della Francesca  entre 1412 et 1420-1492.

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Se fixer sur le possible et non sur l’impossible…

BVJ – Plumes d’Anges.

Nuages exquis…

lundi 9 mars 2020

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« La cuisine japonaise historique a ceci de particulier qu’elle a longtemps utilisé le nuage comme un ingrédient majeur. L’impression aérienne que l’on garde souvent après un repas japonais vient du fait que le nuage est apprécié comme le summum des produits nobles. (…) 

Produit digeste, non allergène et non gras, qui ne contient ni gluten ni sucre, et qui ne pose pas de problème de bilan carbone, le nuage est bien l’ingrédient du XXI° siècle.

Il est en outre très maniable, et son goût délicat se marie avec toutes les sauces. Vous constaterez qu’il peut tout aussi bien servir d’ingrédient principal que d’accompagnement.

Nous pouvons aussi apprécier le nuage comme produit du terroir, car les formes et les goûts diffèrent selon les régions -, de quoi augmenter les plaisirs gustatifs en voyage.

Une seule mise en garde : consommez-le avec modération dans les pays qui manquent de pluie…

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… Comment choisir un bon nuage ?

Produit sauvage par excellence, le nuage est le meilleur reflet de la nature. Il va sans dire qu’il vaut mieux le choisir le moins pollué possible. Certains nuages de campagne sont réputés pour leurs saveurs rustiques. Par ailleurs chaque saison a son nuage, certains nuages disparaissent du marché au bout d’à peine deux semaines. (…) Maniez avec précaution les nuages contenant des éclairs : ils peuvent laisser une légère sensation de picotement sur la langue, ou éclater lors de la friture…

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... De quoi se nourrissent les nuages ?

Certes il est rare qu’on la trouve relatée dans les livres de cuisine historiques, mais la légende veut que le meilleur nuage soit celui qui a mangé des oiseaux. Vibrant au palais, on raconte qu’il permettrait à qui le goûte de rêver, la nuit suivante, qu’il se transforme à son tour en être ailé… »

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Ce petit opuscule des Éditions de l’Épure est une vraie merveille, œuvre à six mains de Ryoko Sekiguchi, poétesse et traductrice japonaise, passionnée de cuisine, Sugio Yamaguchi, Chef cuisinier inventif et Valentin Devos, étudiant/designer à L’ENSCI de Paris.

Tout ici n’est que délicatesse, en attendant, pas de précipitation, restez bien à l’abri pour une dégustation de pure poésie et de grains de folie, et peut-être vous lancerez-vous comme je l’ai fait aujourd’hui dans l’une ou l’autre des recettes proposées par  Sugio Yamaguchi

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– CIEL « GRIZ » –

« Comme un nuage le riz est malléable, adopte mille texture,

abrite mille nuances de gris et de blanc. Il se sale ou se sucre, commence et termine les repas.

Rincez 100 g de riz rond et faites blanchir les grains pendant 5 mn dans de l’eau bouillante. Égouttez.

Portez à ébullition 40 cl de lait et 50 g de sucre. Lorsque les bulles éclatent à la surface du liquide, versez le riz blanchi et 5 gousses de vanille fendues en deux. Baissez le feu et laissez cuire doucement environ 45 mn, en remuant souvent pour que la nacre du riz colore le lait dans son sillage.

Goûtez et vérifiez que la cuisson des grains convient. Coupez le feu, couvrez votre casserole. Laissez refroidir à température, alors que la chaleur rémanente finit de cuire le riz à cœur.

Récupérez les gousses de vanille et déposez-les dans une autre casserole avec 10 cl de crème. Laissez infuser, passez au chinois et faites refroidir la crème parfumée avant de la monter à l’aide d’un fouet. Incorporez la crème dans le riz refroidi pour obtenir une préparation onctueuse et voluptueuse. Plongez une grande louche dans ce lait grisé par le riz, coloré comme un jour maussade où le réconfort viendrait d’un secret de grand-mère.

Chuuut ! »

Extraits de : « le nuage  – dix façons de le préparer »  – 2019 –  Ryoko Sekiguchi, Sugio Yamaguchi et Valentin Devos.

Illustrations : 1/ « Mont Fuji »  Shimomura Kanzan  1873-1930  2/ et 3/  Photos BVJ.

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Se nourrir de tous les grains de poésie…

BVJ – Plumes d’Anges.